Pelouses synthétiques : peu de risque pour la santé selon l’Anses
Depuis quelques années, l’utilisation croissante des granulats de pneus pour les terrains de sports et aires de jeux suscite des inquiétudes quant à leur éventuel impact sur la santé et l’environnement. L’Anses a analysé les études et expertises actuellement disponibles sur le sujet et rapporte les principaux constats quant aux risques potentiels liés à l’utilisation ou la mise en place de terrains synthétiques. Les études existantes concluent à un risque peu préoccupant pour la santé et évoquent des risques potentiels pour l’environnement. L’Anses souligne cependant des incertitudes liées à des limites méthodologiques et un manque de données. L’Agence propose donc des axes de recherche prioritaires qui permettront de consolider les données et de compléter ainsi les évaluations de risque déjà disponibles au niveau international.
Le recyclage de pneumatiques usagés sous forme de granulats pour la production de sols et revêtements synthétiques représente l’une des principales voies de valorisation des déchets de pneumatiques. Ces revêtements synthétiques, de plus en plus utilisés pour les terrains sportifs et les aires de jeux en extérieur ou intérieur, soulèvent depuis quelques années des préoccupations quant à leur impact éventuel sur la santé et l’environnement. Dans ce cadre, l’Agence dresse un état des lieux des connaissances disponibles sur le sujet. Les données recensées portent sur les substances chimiques qui entrent dans la composition de ces terrains mais également celles utilisées pour leur production, leur pose et leur entretien.
L’Agence a recensé plus d’une cinquantaine d’études et expertises publiées au niveau international sur les risques liés aux terrains synthétiques, notamment par l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) et l’Institut néerlandais pour la santé et l’environnement (RIVM). Ces travaux portent principalement sur les terrains de sport synthétiques.
Les études concluent majoritairement à un risque négligeable pour la santé des sportifs et des enfants. Les analyses épidémiologiques existantes ne mettent pas en évidence d’augmentation du risque cancérogène, en particulier des lymphomes et leucémies, associée à la fréquentation ou la mise en place de terrains de sport synthétiques, et ce notamment, au vu des faibles concentrations de substances cancérogènes émises ou relarguées par les granulats de pneus.
Par ailleurs, les données disponibles évoquent l’existence de risques potentiels pour l’environnement liés au transfert de substances chimiques dans les milieux (zinc, phénols…) via les sols et les systèmes de drainage des eaux de pluie. L’Anses recommande donc l’élaboration d’éléments méthodologiques en vue de la conduite d’évaluation des risques environnementaux, à réaliser localement avant toute mise en place de ce type de revêtement.
L’Anses soutient également la proposition de restreindre la teneur en HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques) dans les granulats de caoutchouc, en cours d’instruction dans le cadre du règlement européen REACH, afin de garantir une teneur aussi faible que possible de ces composés préoccupants.
Lors de son travail d’analyse, l’Anses a relevé certaines limites méthodologiques dans les données disponibles. En effet, elles ne prennent pas suffisamment en compte la variabilité de la composition des terrains synthétiques. Ainsi, des incertitudes demeurent quant aux risques sanitaires potentiels associés à ces matériaux, en particulier en lien avec les émissions de composés volatils. L’Agence recommande donc de procéder à une analyse plus large des polluants contenus et émis par ces granulats, en particulier concernant les poussières susceptibles d’être émises afin notamment de préciser les expositions professionnelles.
De plus, l’Anses recommande d’acquérir en priorité davantage de données concernant les utilisations spécifiques des granulats de pneus dans les aires de jeu. Très peu documentées à ce jour, ces utilisations impliquent des populations sensibles et concernent d’autres produits tels que les colles, colorants, liants, agents lissants.
L’Anses recommande également d’approfondir les connaissances concernant les niveaux d’exposition aux terrains synthétiques à l’intérieur des bâtiments et d’investiguer le risque thermique de ces revêtements qui peuvent représenter des concentrations importantes de chaleur en milieu urbain.
Par ailleurs, l’Agence souligne que ces priorités de recherche pourront être réévaluées à la lumière des travaux menés actuellement en Europe et aux Etats-Unis sur l’utilisation des granulats dans les terrains en gazon synthétique.
Plus globalement, ce travail d’analyse des données sur les risques associés aux revêtements synthétiques intégrant des granulats de pneus recyclés, en cohérence avec l’enjeu d’une économie plus sobre en ressources, pose la question de l’identification des externalités négatives (parmi lesquelles les risques pour l’Homme et l’environnement) à intégrer dans le développement de l’économie circulaire, ce que l’Agence s’attachera, pour sa part, à inclure dans sa réflexion sur ses travaux d’expertise à venir.