Inflation normative : les fédérations sportives pointées du doigt

Alain Lambert, président de la Commission consultative d’évaluation des normes, président du conseil général de l’Orne et Jean-Claude Boulard, maire du Mans, ont remis au Premier ministre le 26 mars leur rapport sur l’inflation normative subie par les collectivités territoriales. Les équipements sportifs sont pointés du doigt, un chapitre étant consacré aux excès normatifs des fédérations sportives, avec de nombreux exemples à l’appui. Extraits.

Dans un premier temps, le document rappelle que sur quelques 251.000 équipements sportifs identifiés par le recensement national des équipements sportifs en 2007, 85 % appartiennent aux collectivités locales. Les pouvoirs normatifs des fédérations se fondent sur les articles R 131-33 et R 132-10 du code du sport qui, par délégation, leur confèrent des prérogatives de puissance publique (Cf. annexe IV – Avis du Conseil d’Etat du 20 novembre 2003 rappelant les limites du pouvoir délégué aux Fédérations Sportives). Les collectivités locales sont unanimes à dénoncer les excès normatifs des fédérations sportives, excès qui illustrent les « effets pervers » de la séparation « normeur payeur ».

Les signalements des collectivités locales ont permis d’identifier les sept péchés normatifs des fédérations sportives :

1- Les coûts élevés : Les coûts des équipements exigés par les fédérations et ligues vont de plusieurs dizaines de millions d’euros pour les stades de foot de ligue 1 à des sommes plus modestes, mais qui impactent les budgets locaux.

2- L’instabilité normative : Les fédérations ne cessent de perfectionner leurs normes, les modifiant sans s’interroger sur les conséquences de ses modifications sur les équipements existants.

3- L’aristocratie normative : Dans le monde des Fédérations, l’aristocratie ne se manifeste pas par l’affichage de quartier de noblesse, mais par celle des superficies des locaux d’accueil qui varient selon les niveaux de jeu. Il en est ainsi de la taille des vestiaires réservés aux arbitres qui augmente en fonction des classements sportifs.

4- L’obscurité des normes Lumineuses : 200 à 500 luxes selon les terrains de foot, 1.500 luxes pour la télévision. Les puissances exigées sont définies sans prise en compte des préoccupations d’économie d’énergie et de développement durable. Il en est de même des obligations de chauffage des pelouses en cas de gel.

5- Les incompatibilités normatives : L’absence de toute forme d’harmonisation entre les normes émises par les différentes fédérations rend très difficile l’usage polyvalent d’un même équipement. Ainsi, le basket, le handball et le volley ont des exigences différentes et souvent incompatibles qui sont illustrées dans la fiche 4 à partir des signalements de Dijon et du Havre.

6- Les contradictions normatives : Les fédérations produisent des normes souvent contradictoires avec d’autres émetteurs de normes en matière de handicap ou en matière d’économie d’énergie.

7- Obsolescence normative : La ville de Grenoble signale que la norme résultant de l’arrêté du 7 avril 1981 fixant les règles d’hygiène applicables aux piscines et aux baignades aménagées et qui prévoit deux vidanges par an est obsolète par rapport aux moyens modernes de traitement qui sont permanents. Cette norme coûteuse en eau mérite d’être adaptée en ramenant à une seule vidange.

A l’issu de ce constat, les rapporteurs ont émis cinq propositions pour endiguer l’incontinence normative des fédérations sportives :

1- Encadrer Les normes à impact financier : Il est proposé d’encadrer la délégation de pouvoir résultant des articles L 131.33 et R 132.10 du code du sport en prévoyant que, lorsque dans le cadre de cette délégation, une fédération adopte une norme ayant un coût pour les collectivités, cette norme devra faire l’objet d’une approbation expresse par arrêté du Ministre chargé des Sports.

2- Décréter une pause : Le plan de redressement concerne la période 2013 – 2015. Le CNDS a décidé que dès 2013, il n’y aurait plus de dotation pour les crédits régionaux d’équipement. Le rapport propose de demander la pause sur toutes les normes nouvelles pour la durée du plan de redressement du CNDS et de faire accepter la prolongation des dérogations dont bénéficient les équipements par rapport aux normes existantes.

3- Renforcer Le rôle des élus plutôt que leur nombre dans Le fonctionnement de la Cerfres : Plutôt que d’augmenter la représentation des élus, il convient de conforter juridiquement le pouvoir des représentants des collectivités locales au sein de la Commission d’Examen des Règlements Fédéraux Relatifs aux Équipements Sportifs (CERFRES) prévoyant qu’aucun avis ne pourra être adopté lorsqu’il s’agit d’équipement dont la maîtrise d’ouvrage relève des collectivités locales sans les voix des représentants des collectivités locales.

4- Harmoniser les normes pour favoriser l’usage polyvalent des équipements : Les rapporteurs proposent de confier au Comité National Olympique Sportif Français, la mission d’harmoniser la production normative des fédérations.

5- Demander aux présidents des fédérations de ne pas subdéléguer les décisions de déclassement de leurs équipements, souvent prises par les directions administratives des clubs.

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